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Le sport au Canada: Le cheminement continu vers le sport sécuritaire pour les athlètes féminines

Par Tucker Seabrook (gestionnaire de cas), Alexandra Marshall (chargé de projet) et Jonah Wilson (chargé de projet)

Le blogue Sport Solution est rédigé par des étudiants en droit et a pour but d’offrir de l’information et les points de vue de l’équipe sur les enjeux actuels. Toutefois, le blogue n’a pas pour objectif d’offrir des conseils ni des opinions juridiques. Les athlètes qui ont besoin d’aide doivent contacter la clinique directement à [email protected].

Le Sport sécuritaire au Canada

Le Code de conduite universel pour prévenir et contrer la maltraitance dans le sport (CCUMS) est l’ensemble de règles de base adoptées par toutes les organisations sportives au Canada qui reçoivent du financement du gouvernement fédéral. Publiées par le Centre de règlement des différends sportifs du Canada (CRDSC), ces règles visent à s’assurer que la maltraitance ne menacera pas la santé ni la sécurité des participants qui pratiquent un sport au Canada en veillant à l’avancement d’une culture qui livre des expériences sportives inclusives, accessibles, accueillantes, sécuritaires et de qualité. Le CCUMS aborde un grand nombre de questions en lien avec le sport sécuritaire au Canada, notamment :

  • Les principes communs et un engagement à l’avancement d’une culture sportive respectueuse ;
  • Les définitions standards des différentes formes de maltraitance, telles que la manipulation psychologique, la négligence ainsi que la violence physique, sexuelle et psychologique à l’endroit des personnes ;
  • Des comportements interdits tels que les représailles, un défaut de signalement d’une situation de maltraitance, la déclaration délibérée d’allégations fausses, etc. ; et
  • Le cadre pour déterminer quelles sont les sanctions appropriées pour les parties qui adoptent des comportements interdits.1


Le cadre de sport sécuritaire du CRDSC comprend aussi Sport Sans Abus, dont le principal objectif est de prévenir les abus dans le sport. Sport Sans Abus donne accès à un éventail de ressources bilingues à tout le monde, peu importe le sport, le niveau ou le rôle d’une personne. Ces ressources comprennent notamment un service d’assistance téléphonique, des programmes éducatifs ainsi que des services en santé mentale.

Le Bureau du Commissaire à l’intégrité dans le sport (BCIS) fonctionne en tant que division autonome du CRDSC afin d’administrer le CCUMS de manière juste et équitable par l’entremise de Sport Sans Abus.2Loi sur l’activité physique et le sport, LC 2003, ch 2.[/efn_note] Créé en vertu de la Loi sur l’activité physique et le sport en 20034le BCIS voit à l’avancement du CCUMS en :

  1. Supervisant le processus de réception des plaintes ;
  2. Menant les évaluations préliminaires et en commandant la tenue d’enquêtes indépendantes ;
  3. Maintenant une base de données des sanctions qui ont été imposées ; et
  4. Vérifiant le respect des principes par les organisations sportives.

Le BCIS et le CRDSC n’ont pas encore publié une nouvelle version du CCUMS après la version 6.0, qui était en vigueur jusqu’au 30 novembre 2022. De plus, étant donné que le BCIS fait l’objet d’un mandat fédéral, il ne sert qu’aux athlètes au niveau national, par l’entremise de leurs organismes nationaux de sport (ONS). Les organismes provinciaux/territoriaux de sport (OPTS) n’ont pas l’obligation d’adopter le CCUMS ni le cadre Sport Sans Abus du CRDSC.5

Le Sport sécuritaire et les athlètes féminines

À tous les niveaux du sport, il y a clairement un besoin pour la présence d’un protocole de sport sécuritaire pour les athlètes se présentant comme femmes. Récemment, dans le cadre de ce qui représente sûrement un pas en avant pour le sport sécuritaire et une victoire pour les athlètes partout au pays, on a interdit en permanence à l’entraîneure canadienne en gymnastique Elvira Saadi de travailler avec des athlètes.6 Cette solution a été demandée par les personnes plaignantes. Les athlètes féminines savent comment on peut en arriver à une sécurité accrue dans leurs sports : il suffit de leur demander. 

Au plus haut niveau, des athlètes de niveau élite ont plaidé leur cause devant la Chambre des communes, le 24 avril 2023, pour réclamer que le gouvernement agisse.7 Parmi les athlètes, il y avait des Olympiennes canadiennes en boxe, au soccer et en escrime, qui ont demandé une enquête publique sur la culture du sport canadien. Myriam Da Silva Rondeau, une boxeuse olympique, évoque les frais juridiques et de thérapie, ainsi que le stress financier comme étant un problème énorme auquel les athlètes sont confrontées quand elles sont victimes de maltraitance dans le sport. Il n’y a aucun débat là-dessus : les athlètes ont davantage besoin de soutien. 

Il est facile de mettre en œuvre des protocoles de sport sécuritaire qui protègent les athlètes féminines puisqu’il suffit de leur demander ce dont elles ont besoin. Qu’il s’agisse de modifications mineures comme une planification consciencieuse qui fait en sorte que les athlètes féminines n’aient pas à partager des espaces d’entraînement avec des athlètes masculins ou s’assurer qu’elles ne se retrouvent pas seules avec des entraîneurs, ou encore des politiques à plus grande échelle telles qu’une protection contre les représailles et un financement permettant le soutien des plaignants, il serait possible d’en faire beaucoup plus. 

L’équité et non l’effacement

Il ne fait aucun doute que les abus dans le sport peuvent arriver, et arrivent effectivement aux athlètes des deux sexes, pas seulement aux femmes. Ceci étant dit, la majorité des cas de maltraitance sont signalés par des femmes.8 Étonnamment, le Code de conduite universel pour prévenir et contrer la maltraitance dans le sport (CCUMS) du Bureau du Commissaire à l’intégrité dans le sport ne fait pas mention de la vulnérabilité des athlètes féminines, ni allusion au sexe des personnes, sauf dans le passage suivant : 

Tous les participants reconnaissent qu’un cas de maltraitance peut survenir, peu importe la race, le sexe, l’identité ou l’expression de genre, l’orientation sexuelle, l’âge, le handicap, la religion et autres caractéristiques. Il est en outre reconnu que les personnes appartenant à des groupes marginalisés sont plus vulnérables aux cas de maltraitance.9

Il faut que soit reconnu le fait que les athlètes féminines vivent des situations qui diffèrent de celles de leurs homologues masculins. L’équité ne veut pas dire de traiter tous les groupes de la même façon, cela signifie d’assurer que les différents groupes soient traités comme ils ont besoin de l’être afin de pouvoir vivre des situations aussi sécuritaires les unes que les autres. Les athlètes féminines auront des préoccupations différentes en matière de sécurité et elles vont vivre des situations différentes de celles des athlètes masculins qui pratiquent le même sport. Que le CCUMS ne commente pas davantage cet aspect des choses représente une lacune.

Conclusion et recommandations

S’assurer que les besoins des athlètes féminines en matière de sport sécuritaire soient intégrés dans le cadre de la Commission sur l’avenir du sport au Canada représente une étape cruciale pour obtenir l’équité dans le sport. La commission devrait commencer par demander aux athlètes ce dont elles ont besoin pour se sentir en sécurité et élaborer des politiques fondées sur les avis éclairés qu’ont les athlètes féminines en raison de ce qu’elles ont vécu. Il s’agirait d’une importante avancée dans le cadre de notre cheminement pour assurer la présence d’un environnement sportif sécuritaire pour les athlètes féminines partout au pays.

Citations

  1.  Bureau du Commissaire à l’intégrité dans le sport de Sport Sans Abus, « CCUMS » (2022), en ligne: <https://commissaireintegritesport.ca/ccums>
  2. Sport Sans Abus (2022), en ligne: <https://sport-sans-abus.ca>
  3.  et mandaté par le Gouvernement du Canada le 6 juillet 2021,3Gouvernement du Canada, « Le ministre Guilbeault annonce un nouveau mécanisme indépendant pour le sport sécuritaire » (6 juillet 2021), enligne: Gouvernement du Canada <https://www.canada.ca/fr/patrimoine-canadien/nouvelles/2021/07/le-ministreguilbeault-annonce-un-nouveau-mecanisme-independant-pour-le-sport-securitaire.html>.
  4. Bureau du Commissaire à l’intégrité dans le sport de Sport Sans Abus, « Signataires du programme » (2022), en ligne: <https://commissaireintegritesport.ca/signataires>.
  5. Rick Westhead, « Veteran Canadian gymnastics coach handed lifetime ban from working with athletes » (20 novembre 2023), en ligne: TSN<https://www.tsn.ca/olympics/>
  6. John Paul Tasker, « Elite athletes demand public inquiry into abuse in sports » (dernière mise à jour le 25 avril 2023), en ligne: CBC <https://www.cbc.ca/news/>.
  7. Laura Misener et Angela Schneider, « Expert insight: Abuse in Canadian sports highlights gender and racial inequities » (15 février 2023), en ligne: Western News <https://news.westernu.ca/>
  8. Bureau du Commissaire à l’intégrité dans le sport de Sport Sans Abus, « Code de conduite universel pour prévenir et contrer la maltraitance dans le sport » (2022) voir [1] en ligne (pdf): <https://commissaireintegritesport.ca/files/CCUMS-v6.0-20220531.pdf>